lundi 18 avril 2011

Infanticide

En droit criminel canadien, l'infanticide est le fait, pour une femme, de causer la mort de son bébé alors qu'elle n'est pas psychologiquement remise de la naissance de cet enfant ou de l'allaitement.  Il s'agit donc, en langage plus moderne, du fait de tuer son bébé en période de dépression post-partum.

Cette mort peut être causée par un acte ou par une omission, comme dans les cas de négligence criminelle.

On pourrait difficilement parler d'un infanticide devant le meurtre d'un bébé de plus d'un an1, mais il ne faut pas non plus confondre avec le geste de "néonaticide", geste habituellement commis dans les 24 heures de la naissance d'un enfant, qui n'existe pas en droit canadien et dont on a discuté en France dans la foulée de l'affaire Courjault.

On ne peut pas parler non plus d'infanticide lorsque le geste est posé par le père.  L'accusation en sera alors toujours une de meurtre.  Il est donc erroné de parler d'infanticides relativement aux gestes posés par le Dr. Guy Turcotte sur ces deux enfants.

Alors que la peine pour le meurtre est la prison à perpétuité, avec une possibilité de libération conditionnelle après 25 ans dans le cas du meurtre au premier degré, et avec une possibilité de libération conditionnelle après 10 à 25 ans dans le cas du meurtre au second degré, la peine pour le crime d'infanticide est de 5 ans maximum.

L'infanticide est une infraction moindre et incluse au crime de meurtre, ce qui signifie que, devant une accusation de meurtre, le juge ou le jury peut acquitter l'accusée de meurtre, mais la déclarer coupable d'infanticide2.  L'accusée devra alors avoir fait la preuve, un peu comme s'il s'agissait d'une défense de troubles mentaux, qu'elle était encore déséquilibrée au moment du drame en raison de l'accouchement récent.

***Ajout:  Pour ceux et celles qui m'accusent d'être féministe (ce que je suis, mais bon) et sexiste, le Code criminel est ainsi rédigé, et sa rédation n'a pas vraiment changé depuis 1922:
Article 233 - Infanticide:

Une personne de sexe féminin commet un infanticide lorsque, par un acte ou une omission volontaire, elle cause la mort de son enfant nouveau-né, si au moment de l'acte ou de l'omission elle n'est pas complètement remise d'avoir donné naissance à l'enfant et si, de ce fait ou par la suite de la lactation consécutive à la naissance de l'enfant, son esprit est alors déséquilibré.
Je serais étonnée que le législateur, dès 1922, ait été un grand féministe.  Il faut arrêter de délirer.  Cette disposition n'est pas contre les hommes.  Elle fait simplement prendre en compte un phénomène psychologique post-partum qui ne touche que les femmes, depuis la nuit des temps.

Aussi, le fait que le Docteur Turcotte ne puisse pas être trouvé coupable d'infanticide ne signifie pas qu'il n'a pas une défense de trouble mental valide et solide à faire valoir.

Une condamnation pour infanticide peut mener à une peine de prison maximale de 5 ans.  Une déclaration de non responsabilité criminelle pour cause de trouble mental, habituellement, mène le justiciable à l'hôpital psychiatrique pour une période indéterminé.

Ce billet visait simplement à corriger des erreurs entendues et lues chez certains journalistes judiciaires qui affirment que Guy Turcotte est accusé d'infanticide.  Dans le langage courant, certes, infanticide veut dire "tuer son enfant".  Mais on est ici -sur ce blog et dans le procès de guy Turcotte - en droit criminel canadien, et le crime d'infanticide ne peut pas être commis par un homme, pas plus qu'il ne peut être commis sur un enfant de 5 ans.

1.      R. c. Guimont, Cour d’appel du Québec, 1999.
2.      R. c. L.B., Cour d’appel de l’Ontario, 2011.

7 commentaires:

  1. Très intéressant... Donc, une femme peut être déclarée coupable d'infanticide, mais acquittée de meurtre, si elle parvient à prouver sa défense de dépression post-partum. Mais peut-elle être acquittée de meurtre ET d'infanticide en prouvant une aliénation mentale, même si due à une dépression post-partum?

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  2. Elle ne serait alors pas acquittée, mais déclarée non responsable pour cause de trouble mental.

    Votre question est hyper intéressante, je dirais que oui, bien sur, si elle répond aux critère du trouble mental qui sont bien plus rigoureux et difficiles à rencontrer que ceux du post-partum. Il faudrait que son post-partum ait fait naître une réelle psychose, l'empêchant de distinguer le bien du mal.

    Mais, encore une fois, elle serait alors déclarée non criminellement responsable et envoyée à l'hopital psychiatrique pour une période indéterminée: elle ne serait pas acquittée.

    Merci pour cette question!

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  3. Très intéressant votre article, il permettra à ceux qui suivent le procès du Dr. Guy Turcotte de saisir une nuance importante dans cette affaire.

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  4. on appelle pas ça un filicide dans le cas du meurtre de ses enfants ? je connaissais déjà la nuance de l'infanticide, c'est effectivement important de faire la différence... ;) Intéressant l'article, je trouve aussi...

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  5. C'est vraiment affreux. Est-ce que les mères comme cela utilisent un avocat criminel ? Je me demande si Vargas Bruno Gabriel les aidera.

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  6. Du grand n'importe quoi. Du sexisme à l'état pur. La femelle dépressive bénéficie d'une forme d'impunité.
    Je termine mon commentaire sans élaborer davantage tellement cet article m'écoeure. 😡

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    1. C'est le droit criminel de common law centenaire qui vous écoeure, pas cet article qui ne fait que l'expliquer.

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