Si je comprends bien, le sénateur persiste et signe, tout en s’excusant pour l’image de la corde. Si je comprends bien, les détracteurs du sénateur, dont je suis, seraient des hypocrites, puisqu’ils ne pleurent pas quand un tueur s’ouvre les veines en prison.
Il n’y aurait donc aucune distinction entre un tueur qui se suicide dans sa cellule sans rien demander à personne et la prise de position publique, politique, selon laquelle une procédure de suicide assistée devrait être implantée auprès des individus condamnés…
Alors puisqu’on y est, et puisque cette position serait défendable pour certains, poussons le raisonnement jusqu’à son accomplissement dans la sphère du concret. Il faut le faire, puisqu’on n’aurait omis, semble-t-il, de remettre en contexte la déclaration du sénateur.
Or, au Téléjournal de 22h le sénateur a réitéré. Il a réaffirmé que les détenus ayant reçu des peines sévères devraient avoir la possibilité de se tuer. Remettre ça dans son contexte, c’est de l’envisager dans le concret.
On l’offre à qui, cette possibilité de se tuer? À tous les récidivistes en qui les criminologues n’ont aucun espoir de réhabilitation, y compris ceux qui ne tuent pas et ne commettent pas de crimes violents? À tous ceux qui reçoivent des «sentences vie», même pour ceux chez qui la récidive est peu probable? À tous ceux qui reçoivent des peines indéterminées, c’est-à-dire ceux qu’on déclare délinquant dangereux?
Parce qu’il faut décider à qui on l’offre, ce suicide… Est-ce qu'on l'offre même à ceux dont le repentir est sincère et qui ont reçu le pardon des parents des victimes (ce qui est rare et incompréhensible, j'en conviens)? Dans un tel cas, peut-on songer à donner un certain pouvoir décisionnel aux parents des victimes ou à la victime vivante? À moins que ce soit réellement une affaire de libre choix offert à chaque détenu, peu importe le crime et peu importe le cheminement post délictuel du délinquant?
On l’offre quand? Au moment du prononcé de la peine? Le juge alors termine son jugement en énonçant, «vous avez aussi le droit de mourir, voulez-vous mourir oui ou non»? Ou encore ça se passe après le triage au Centre régional de réception, une fois rendu dans son pénitencier, le détenu recevant une lettre (du ministre de la Justice, ou du ministre de la Sécurité publique) lui expliquant ses possibilités de mise-à-mort?
On lui fait prendre quand et comment, sa décision? Par écrit, devant un comité, ou encore simplement par un «speedy mémo» interne aux agents de services correctionnels? Peut-être que c'est simplement son «élu» qui vient lui rappeler qu'il peut crever? Ou alors on crée un Comité du suicide optionnel qui siège tous les 12 mois? Ce serait, dans le jargon, le «Comité Boisvenu», à l'instar du député Guillotin qui a donné son nom à la guillotine. Et il peut changer d’idée, ou pas, le futur mort, après avoir été entendu par le Comité? Si oui, il a combien de temps pour le faire?
Et quelle est la procédure de ce suicide assistée? Ça se passe dans l’intimité ou en public? Avec ou sans l’assistance d’un bourreau? Dans l’intimité, il se tue comment? En avalant une très grande quantité de son Seroquel habituellement prescrit? C’est alors le médecin de la prison qui devient son bourreau? Et si on le suicide plutôt publiquement, on le fait par injection létale, sur la chaise électrique, ou avec une balle dans la tête?
Ce qui m’échappe, dans cette position, c’est que les détenus ont d’ores et déjà le choix de se suicider. Comme quiconque. Et que ce n'est pas chose rare qu'un détenu se tue. Si on veut leur donner une option qu'ils ont déjà, c'est qu'on veut instaurer un mécanisme étatique pour faciliter leur libre choix, non? Alors ces questions-là, il faut les poser, et y répondre.
Je vous laisse le faire. Moi je retourne à mes bandits, ils me font moins peur.
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